La danse du destin

Sarajevo, 12 ans après
portraits

Amir et l’arbre déraciné

Ecoutez le témoignage

Amir Hajric , 22 ans, vit à Dobrinja, banlieue de Sarajevo, ligne de front pendant la guerre. Cette zone avait été complètement détruite et la végétation avait disparu; on utilisait le bois des arbres coupés pour se chauffer. Aujourd’hui on a replanté des arbres et Amir, qui est devenu un jeune au physique athlétique,fait épreuve de sa force et son agilité. Il veut devenir un entraîneur de football.Les immeubles ont étés réparés et des nouvelles constructions sont apparues.

Quand j’ai montré la photo d’ Amir dans la rue personne ne l’ avait reconnu. Trop de temps était passé; un vieux professeur de l’ école Skender Kulenovic se rappelait quand même le nom de cet adolescent très exubérant. Son adresse m’était inconnue. Qui mieux d’un postier pouvait me guider? C’ est ainsi que je suis arrivé à frapper à la porte de la famille Hajric.

Le jeune adolescent avait grandi mais son visage m’était familial. Toute la famille c’est réuni, amusé et émue autour de cette vielle photo.

« Je m’appelle Amir. Comme tu peux le voir, beaucoup de choses ont changé. Mon quartier, Dobrinja, a été remis en état, les bâtiments restaurés, les arbres ont poussé et moi aussi.

Il y a quelques années, j’ai eu le bac et après je me suis inscrit à l’université.

Depuis 9 ans, je joue au football et je m’entraîne avec discipline.

Enfin j’aimerais devenir un jour entraîneur d’une importante équipe de football. Le passé c’est le passé, je regarde devant, vers le futur. Ca me fait rêver et j’aime ça…

Depuis toujours je suis fan de l’ Inter de Milan. Mon joueur fétiche est le brésilien Adrien. J’aimerais devenir un «grand» comme lui. C’est ça mon rêve: jouer un jour dans l’équipe de l’Inter de Milan et je pense que parfois les rêves deviennent réalité. En attendant, je m’entraîne avec passion»

Amer, le meilleur joueur d’accordéon pendant le siège

Ecoutez le témoignage

Pour Amer tout faisait penser à un futur prometteur d’accordéoniste. Tout jeune, il était déjà le meilleur. Puis, après la guerre, la chance lui a tourné le dos.

Je m’appelle Amer Hodjic. J’ai trente ans. Quand tu m’a montré cette photo, beaucoup de souvenirs me sont revenus à l’esprit. Elle avait été prise pendant la répétition d’un concert de la fin d’année à l’académie de musique. Ma vie a beaucoup changé en douze ans. J’ai fini mes études en 1995 puis j’ai participé à un concours de musique populaire à Istanbul où j’ai terminé quatrième meilleur accordéoniste. A cette époque, j’étais persuadé que je devais composer et jouer de la musique et que tout le reste passait en deuxième plan. Avec le temps, je me suis rendu compte que je devais me battre pour construire ma propre vie et arriver à m’en sortir.

Je remarque aujourd’hui que tout le monde se tourne vers son travail, se bat pour gagner de l’argent et oublie tout autour de lui et surtout oublie – ou veut oublier- ce qui s’est passé. Se tourner dans l’avenir c’est bien, mais pas pour oublier. Un épisode a marqué mon existence après la guerre. Il s’agit d’un banal mais grave accident de circulation. Je me suis fracassé le crâne, les deux jambes et la cage thoracique. Je suis resté à l’hôpital six mois. Suite à cet accident je n’ai pas pu continuer à l’académie de musique car avec mes doigts blessés je n’ai plus pu jouer comme avant. Ceci dit j’ai eu la chance de trouver un travail qui est lié à la musique et je travaille pour la télévision en tant que rédacteur en chef pour les émissions de musique. La musique reste donc au centre de ma vie!